CHAPUT Jean
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Livre d'Or des Tréteaux page 144
Chaput Jean
Adresse de l'époque: 1 bd Lamartine 05 GAP
Par Natalis Anquier (juillet 1942)
Si Chaput, au lieu de rester dans l'anonymat se fut présenté
aux Tréteaux, ou bien que Foussac l'ait découvert
quelques jours plus tôt lors de la création, il eut été
un des piliers sur lesquels on fonde un édifice. Comparons le simplement
mais cela imagine bien Chaput; une poutre maîtresse sur laquelle
s'appuient les solives du plancher "de l'étage à succès".
Jean Chaput garde-t-il de sa naissance auvergnate quelque sauvagerie
qui le pousse à ne pas s'extérioriser, à se renfermer
en lui-même, ou bien sa jeunesse laisse- t-elle son âme errer
vers des buts que ses camarades ne comprennent pas. Toujours est-il que
Chaput
a un caractère très personnel que notre amitié commune
m'a permis d'apprécier et d'en user pour le plus grand bien de ce
sentiment et d'autre part pour......."Les Tréteaux".
Foussac, un jour eut la révélation que Chaput,
le tailleur arrivé de Otten-Hosen avait certainement de l'étoffe
(c'est le cas de le dire) pour les rôles féminins.
Nous n'eûmes pas à l'embêter pour entrer dans notre
troupe, il y prenait d'emblée le rôle (masculin) du Fakir
Thora pas le Bey et montra une mémoire qui nous le faisait envier
et certains jeux de scène très réussis; Justin du
"Savant
Tardize", là encore, il nous émerveilla. Au contraire
de beaucoup de nos camarades, il ne vint pas progressivement à la
tête d'affiche, il s'y implanta de suite et les Tréteaux avaient
confiance en lui d'autant qu'il donnait un nouvel essor à la partie
accessoires en composant une garde robe théâtrale qui ferait
envie ç de nombreuses troupes même plus conséquentes.
Assez trappu, il avait gardé du sport une certaine élégance
qui le modelant, allait nous le présenter sous la silhouette féminine,
l'agrémentant lui-même de perruques qu'il confectionna et
qui nous émerveillèrent tous. C'est alors que je créai
pour lui notre premier drame, celui qui à Foussac et moi
semblait pourtant un paradoxe, un drame dans le drame que nous vivions,
du titre "l'Océan" tiré de la chanson et où
il était accroché la femme fatale Cobra qu'il stylisa
très bien et c'était fait, ilétait la vedette féminine
des Tréteaux dans ce genre.Continuant à nous monter sa garde
robe dont nous sommes si fiers, il crée un rôle très
spécial auquel ne prédisposait guère cet "enfant à
sa maman" (excuse m'en Chaput, l'expression populaire sortirait de la Sente
des Montiboeufs !). Il sera le Totoche, rôle principal féminin
des "Bas Fonds de Paris", il progresse encore et son 4ème
acte est excellent, on sent le sentiment chez lui et il sera une des raisons
que j'écrivais alors la fameuse "Madone aux Fleurs". Ce sera
le point culminant de Chaput, il est amoureux au possible autant
que poignant de désespoir ou de sentiment maternel. Sa lutte avec
le Professeur Lemercier et le prof de peinture Brunet remue autant que
la Nita, la Madone vendant son bouquet au porche des églises pour
nourrir son petit.
Dommage que la photo n'ait pas pu enregistrer ce tableau: Chaput
devant l'église avait je ne sais quoi de vivant que je ne lui soupçonnais
même pas.
"Le Voyage Improvisé", notre 1ère pièce
civile, doublement chère aux Tréteaux par sa provenance à
sa distribution, tandis qu'Houfflin sera Hortense, Chaput
sera Betty, une femme d'architecte (hum!) volage (re hum!)mais qui saura
trouver des satisfactions compensatrices dans d'autres bras.
En répétition, Chaput improvise une voix d'outre
manche, entraina Bordi à prendre l'accent argentin et Houfflin
le sien, celui du ch'Nord.
Aux reprises des Bas Fonds de Paris et de la Madone pour les Kdos voisins,
il joua avec plus de conviction encore
Et c'est Buss, "l'Océan" et sa Cobra mais les Tréteaux
inscrivent une pièce du répertoire de la Malaria: "Le
Permis de faire l'Amour", il manque la Betty (décidément
ce prénom lui plaît et in-extremis avec Houfflin, il nous
permette à cette opérette de se dérouler).
C'est la reprise des "Bas Fonds de Paris", mais Chaput
a un autre but: écrite à Dillingen, son opérette
"A
Vienne un Soir" s'accroche au programme.
Il s'affaire pour ses accessoires qui seront délicieux et il
confectionne des robes à volant de grande allure. L'opérette
aura un des plus grands succès de notre activité et restera
dans les mémoires, les airs de Bleuez, Mony et Laquerrière
sont fredonnés souvent. Le rôle de Lylian, la vedette sera
naturellement tenue par lui, il sera moins bon qu'à l'ordinaire
mais c'est inévitable: ses fonctions de metteur en scène,
d'animateur, jointes à la "trousse" de l'auteur.
"A Vienne un Soir" de Jean Chaput restera une des plus grandes
manifestations des Tréteaux et un excellent souvenir.
Et puis Chaput se renferme "dans sa coquille", susceptibilité
ou occupation d'esprit, il me lâche dans "3 de la Légion",
créé pour lui, pourqu'il ait enfin un rôle d'homme
et pour l'Orphelin, pardon Houfflin. Venant de Chaput, j'accuse le coup.....
Il se rattrape dans "la Madone aux Fleurs", qu'il affectionne
particulièrement comme dira Flori dans son compte rendu, il sortira
de sa réserve, il prend le grand jeu et attire les larmes, ce sera
inoubliable.
Et puis, pour me faire plaisir, il sera "Le Juge...ment" dans
la pièce de ce nom et c'est encore un rupture dans "Femmes de
France" qui ne le verra pas, pas plus que la "Revue Paris Paris".
Mais en petit capricieux qu'il est et que je connais, il est séduit
par la pièce de Seize "Dormez-vous" dont la jeunesse se plait
dans cette exubérance. Il emmène la troupe au succès
pour la semaine anniversaire des Tréteaux.
Chaput n'avait pas toutefois cessé de donner sa mesure dans
son rôle de tailleur-costumier et également dans la tâche
difficile de maquilleur de ces dames.
Il joint à sa fantasque humeur une persévérance
qui lui fait excuser beaucoup à cela et son vilon d'ingres,
pardon le banjo de Chaput en sait quelque chose.
Aura-t-il manqué une seule fois sa répétition
journalière, je ne m'en souviens plus.
Voilà donc une des figures en renom des Tréteaux et qui
aura bien mérité des éloges.
J'y joindrais ce qu'il sait dèjà tant, l'assurance d'une
amitié, d'une fraternité que je me suis efforcé de
lui faire tenir comme à mon autre vedette, Louis Houfflin.
A toi Jean, mon souvenir