Les Carnets

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Les Boniments de Paris

 

 

Les Boniments de Paris (Pages 28 à 34 du livret original)

Monologue en 3 couplets

 

1er Couplet

Avouons sans plus d’mystère

Qu’il faut essentiellement

Pour réussir sur cette terre

Savoir Faire du boniment

 

Tous les boniments se ressemblent car ils ont tous le même but, attraper les gogos

Dans la rue, sur le boulevard vous passez devant la boutique d’un bijoutier :

Monsieur ne désire pas une montre, des pendants d’oreilles ?

Merci bien, vous voyez bien que je n’ai pas l’habitude d’en porter.

Vous entrez dans un magasin pour acheter des mouchoirs de poche

L’employé qui vous sert ne manque pas de vous dire :

Et avec ça, Monsieur ne désire pas une canne à pèche, une armoire à glace ?

Le boniment c’est le commerce et quand le boniment va, tout va.

A la salle des ventes, c’est le boniment du commissaire priseur :

Nous vendons un superbe tableau de Dubout, c’est signé et daté !

Remarque qu’il représente le parc de Vienne, une prise à 3 heures du matin, parce que le soir il y aurait trop de monde, ça ne tiendrait pas dans le tableau.

Allons Messieurs, 2000 f ce n’est pas le prix du carton

50f, 20f, 10f, 5f c’est bien payé enlevé moi cette saleté là.

 

Refrain

Ah c’est vraiment étonnant, surprenant, mirobolant

Il faut l’avouer vraiment, rien ne vaut le boniment

 

2ème Couplet

Sans crainte de la critique

Nous pouvons passer maintenant

Du commerce à la politique

Car c’est toujours du boniment

 

Le candidat à la députation, à mes chers concitoyens.

C’est avec un vif sentiment de satisfactions, doublé d’une joie profonde que je prendrais place au centre de cette réunion pour me trouver au milieu de vous, chers concitoyens vous le savez, mes idées sont les vôtres, mon programme c’est le vôtre, vous pouvez m’envoyer à la chambre des députés, je connais mes devoirs et je saurais les remplir, je travaillerais sans excès car voyez vous, l’excès sans but est un défaut et si je dispose  de quelques bonnes places, je songerais sachant à ma famille car voyez, la famille c’est sacré afin d’être bien dans le mouvement et puisqu’on voyage gratuit, soyez persuadé que je serais toujours dans le train si à la chambre je me permets parfois quelque interruption, songez bien que je n’en souffrirais pas dans le paiements de mes appointements. Ne croyez pas aux personnes mensongères des autres candidats, avec moi rien à craindre, j’ai un énorme toupet, une conscience élastique, je ne dis jamais un mot de vérité, je sais courber l’échine quand il le faut et recevoir le sourire aux lèvres.

Le peuple réclame « la poule au pot » dites vous, moi je ne demande qu’une chose « l’assiette au beurre ».

Allons faire un tour à la foire et arrêtons nous devant la boutique de ce banquiste, habitants de cette ville accourez et précipitez vous, l’illustre Bilboquet est dans vos murs, il vient de faire 500 000 kilomètres pour vous rapporter les nouvelles de l’Asie occidentale et même des forets vierges où la main de l’homme n’a jamais mis les pieds. Entrez sieurs et dames, venez voir le jeune Polascine qui après 100 années d’études vient de remporter

Le premier prix du chapeau chinois au conservatoire de l’amande et bien qu’il put rester longtemps amand, je puis vous certifier que ce n’est pas un fruit sec. Entrez sieurs et dames venez voir l’Apollon du réverbère, le tonneau d’Adélaïde, la soutane de l’abbé Résina,  et la moustache d’un nommé Sanson qui poussa 10 000 Philistains  au fil de l’épée avec une mâchoire d’acier.

Pour répondre aux nombreuses demandes qui nous sont adressées des cinq parties du monde, j’ai fixé pour aujourd’hui le prix d’entrée à 0,15f les militaires et les bonnes d’enfants, les fantassins et les troufions ne paierons que trois sous.

 

3ème couplet

Voyez cette foule accourue

De tout coté en ce moment

C’est un camelot dans la rue

Qui débite son boniment

 

Venez Mesdames et Messieurs, je ne viens pas pour vous dire ceci ou cela

Je viens tout simplement vous dire voila ce que c’est, tel que vous me voyez

Je me nomme Auguste Boule en Bois, je suis fils de famille

J’ai beaucoup voyagé, un jour que je me promenais sur les bords du Gange, ce fleuve sacré des indiens, voilà ce que j’aperçois tout à coup, subitement, une jeune fille, belle comme le jour qui avait deux choses remarquables un air simple et un tambour de basque dont elle s’accompagnait en chantant.

Tout à coup, son pied glisse elle tombe dans le bouillon, je me précipite à son secours et je suis heureux de l’arracher à a fureur des flots. A peine l’ai-je posé sur le rivage que je vois apparaître quatre cavaliers richement caparaçonner. Qui que tu es noble étranger me dit l’un d’eux.  Sir que je lui réponds (car c’était bien lui) je me nomme Auguste Boule en Bois, je suis fils de famille et j’ai beaucoup voyagé.

Que veux tu pour ta récompense car tu viens de sauver ma fille. Sire que je lui réponds, les français ont le cœur noble et généreux et lorsqu’ils se jettent à l’eau c’est toujours pour sauver un de leurs semblables à moins que ce ne soit pour un besoin de propreté. Je ne vous demande rien mais puisque sa majesté daigne m’accorder une faveur, je demanderais de vendre dans ses états les fameux articles dont je suis l’inventeur.

Et bien Mesdames et Messieurs c’est ces fameux articles que je viens soumettre à votre intelligible approbation.

Voila déjà mon crayon, protège pointe  et gomme. Voyez le finis et distingué de ce bel objet. Ce n’est pas dans les grands magasins que vous en trouverez un comme cela (n’approchez pas les enfants). Ce n’est pas tout, voilà ma montre en acajou qui marche comme une pendule asmatique, non seulement elle marque les secondes, les minutes, les heurs, les mois, les années, le siècle mais encore elle marque le linge (n’approchez pas les enfants) Et bien, les deux articles je ne les vends pas je les donne. Ce que je demande c’est d’avoir un petit souvenir et je l’ai fixé ce petit souvenir à 2f autrement dit 6 sous. Ah vous ne me remerciez pas ingrats que vous êtes.

Je suis l’illustre Docteur Micoqui Joni, connu du monde entier par ses œuvres merveilleuses particulièrement pour avoir guéri le tropique du cancer, approchez vous donc avec confiance, vous qui êtes affligés, rongés par les maux de l’humanité, fussiez vous en panade, en marmelade, égouttés, édentés, toutes infirmités, fussiez vous manchots, borgnes banales, cul de jattes absolument dégoûtés des pilules féculo-globules, asthmatiques, cholériques et bourriques ravagés par la coqueluche, la rage ou le choléra ceci m’est égal avec une seule application de mon remède pendant huit mois consécutifs, la guérison est certaine, le remède le voici.

C’est un sel composé tout simplement de cendres de lion de dynamite et d’un acide buffalo-carbonique. Vous en prenez un demi milligramme que vous faites fondre dans un litre d’eau et lorsqu’il est complètement dissous, vous en prenez une cuillérée le matin en vous couchant et le soir en vous levant et au bout de huit mois, si vous êtes pas guéri, c’est que vous avez la vie dure. Mon remède je ne le vends pas 90 sous ni 20 sous ni 10 sous mais à 2 sous seulement, et il n’y a que les crétins, les idiots et les imbéciles qui n’en n’achèterons pas.

 

Refrain

Ah c’est vraiment étonnant, surprenant, mirobolant

Il faut l’avouer vraiment, rien ne vaut le boniment

 

Le 7 septembre 1915